Récit de bataille: Le débarquement au Norfendre

[Bon, vous n'êtes pas sans savoir que Bengus est soldat depuis trèèèès longtemps, donc je me suis mit en tête de vous narrer toutes les plus grandes batailles pendant lesquelles il s'est distingué !]




--LE DEBARQUEMENT DE LA TOUNDRA--
Ou "Comment gagner le surnom de << Moulin à viande >>"



Cela faisait plusieurs jours que le nouveau port d'Hurlevent subissait les coups de boutoir du Fléau. Wyrms, épidémie de goules... Mais les troupes étaient prêtes, enfin. Nous avions quelques navires accostés plus au nord, où un gigantesque campement trônait. Il fourmillait d'humains, de nains, d'elfes... Tous attendaient le signal.

Plusieurs jours passèrent, les soldats étaient fébriles. Je sentais une tension hors du commun sur le camp. Mes frères d'armes aiguisaient leurs haches, et équilibraient leurs marteaux. Je me souviens de cette soirée. Le camp était très calme. Beaucoup d'entre nous dormaient afin de se préparer à la gigantesque bataille à venir.
J'étais en train d'ajuster les sangles de mon armure lorsqu'un cor grave résonna longuement dans le camp. Je levais la tête. Rapidement, le camp s'anima, les soldats prenaient leurs armes sur les râteliers, et finissaient leurs chopes. Le temps était venu.

Le général cria "C'est le moment, les gars, tout le monde sait ce qu'il reste à faire !". Sans que j'aie rien à dire, la section de combat qui était sous mes ordres se mit en rang devant moi.
"D'accord, les gars. Ce soir est le grand soir ! On embarque dans le brise-glace le plus au nord de la plage, le Marteau de Givre ! ALLEZ, ON Y VA !"
Mes hommes avaient confiance en moi. Nul besoin de les motiver avant une grande bataille comme celle-ci.
Nous entendîmes les passerelles des brise-glace frapper le sol, dans un fracas de chaînes. En quelques minutes, nous étions sur le pont de notre bateau. Mes cinquantes hommes étaient en rang, et se murmuraient des encouragements habituels. Quatre cents autres fantassins étaient dans les cales.
En moins de vingt minutes, les ancres furent relevées, et les brise-glace partis vers les côtes du Norfendre.
Le voyage nous parut très court. Nous étions trop concentrés pour faire attention au temps. La vigie cria "Terres en vue !".
Toujours sans un mot, nous sommes montés dans la barge de débarquement qui nous était réservée. Une embarcation solide, avec une porte massive à la proue, qui servirait de protection, puis de passerelle au moment venu.

Le soleil commençait à se lever. Une brume légère parsemait la plage, et le vent glacial et humide qui venait du continent faisait claquer nos capes. La barge fut mise à l'eau, et le moteur gnome fut mis en route. Une possible explosion me parassait encore moins dangeureuse que les ennemis qui nous attendaient, tapis dans la brume.
Le regard portant au loin, je sanglais mon casque, fit craquer une dernière fois mes jointures et adressai un signe de tête à mes troupes. Tous se retournèrent face à la plage, cachée encore par la passerelle fermée.
Un raclement sourd nous indiqua que la barge venait de freiner sur le sable. Je descendis avec mes hommes. A ce moment précis, le seul bruit qu'il y avait était le claquement des vagues sur la coque de notre embarcation.
Le cor retentit. Dans un grincement de chaînes, la passerelle descendit rapidement et tomba sur le sol. Il y eu une fraction de seconde pendant laquelle tout le monde retint son souffle.

"CHAAAAAAAAARGEEEEEEEEEZ !!"

Dans un cri guttural, je fonçais tête baissée en bousculant les quelques frère d'armes qui m'empêchaient d'être en première ligne. Ce cri résonna sur la plage, et d'un coup, tous les soldats hurlèrent en choeur, qu'ils soient nains, humains, ou elfes. Le bruit des bottes de plaques tassant le sable alternait avec le souffle haletant des soldats chargeant dans la brume. La visibilité était d'à peine 15 mètres, cependant des sifflement caractéristiques nous indiquèrent immédiatemment la présence de démons des cryptes nérubiens.
En quelques secondes, nous vîmes leurs silhouettes sombres se détacher dans la brume. Un court silence.

Un immense fracas métallique secoua la plage. Les armures de plaques heurtant violemment la chitine épaisse de ces monstres. Tous mes soldats se battaient avec un bouclier, sauf moi qui maniait habilement deux haches lourdes. A travers l'étroite visière de mon casque, j'aperçus un de mes hommes tomber sous les coups de nérubiens. Je m'élançait violemment sur eux, m'emportant très rapidement dans une rage meurtrière.
D'habitude, je mets plus de temps à atteindre cet état de folie propre aux berzerks. Réflexes accrus, force augmentée et douleur ignorée, je me mis à frapper.
Dans un vrai déluge de coups, de tournoiement d'acier et de coups d'épaules je me déchaînais contre l'ennemi. L'acier taillait dans les instectes avec un bruit de succion et des éclaboussures du jus que contenaient ces créatures. Criant à m'en faire saigner les cordes vocales, j'expédiais ma rage avec une rapidité et une force que je n'avais jusqu'alors jamais connu. L'adrénaline fit frissonner mon dos, et la frénésie fut accompagnée d'une ivresse du combat incroyable.
Rares sont ceux qui connaissent ce frisson de la guerre.

Tranche, taille, et court. Voilà ma devise. Jusque là je n'aurais jamais pensé faire les trois en même temps.
Peu à peu, les corps encombrèrent la plage, au fur et à mesure que le soleil s'approchait du zénith. Mes bras commençaient à s'engourdir, et ma vision à devenir floue. Nous étions encore trente fiers nains à nous battre côte à côte contre une horde ininterrompue de nérubiens. Les canons tonnaient au loin, les boulets sifflaient et déchiquetaient les créatures qui dévalaient la falaise. Les cannonières tentaient de boucher les puisards d'où jaillissaient sans cesse les démons des cryptes.
Même si les berzekers sont capables de redoutables pointes de puissance, ils s'affaiblissent très vite en cas de combat prolongé. Souvent, ces montées de rages se succèdent, mais avec des intervalles de temps de plus en plus longs, au fur et à mesure que le corps crie sa souffrance.
En effet, ces efforts on un prix: se battre ainsi en étant blessé peut augmenter drastiquement l'importance de la blessure. Les berzekers ne meurent jamais au combat, en général ils succombent à des blessures terribles, une fois l'ennemi vaincu.

Les heures de combat se succédaient, la lassitude s'emparaient de nos troupes. Mais la lutte continuait. Les corps souffraient, l'esprit dominant le physique.
Je remarquais vers le milieu de l'après midi que la violence extrême de la bataille avait grandement diminué. Nous n'étions plus que huit, qui défendions les corps de nos camarades tombés. Sur tout le reste de la plage, il devait rester au moins six cents soldats sur les deux milles envoyés. Beaucoup de puisards s'étaient finalement effondrés sous la pluie d'obus que crachaient les cannonières. C'est vers le début de la soirée que les derniers nérubiens furent abbatus. Ayant laissé mes haches profondément plantées dans le thorax d'une créature, je profitais d'être à mains nues pour redonner du moral. Sautant sur le dos d'un nérubien restant, je lui pris la tête et l'orienta en face des hommes. J'avais laissé tombé mon casque depuis un bon moment, ce qui permis à mes hommes de voir un sourire vicieux sur mon visage. Ils regardèrent avec attention.
Les fantassins achevaient les derniers nérubiens, tandis que j'empoignais fermement la tête du mien.

"MEURS, MORPION !!"

Concentrant mes dernières forces dans mes mains, je me mis à serrer le crâne de la créature. Elle se mit à hurler, dans des sifflements horrifiants tandis que je sentais la chitine commencer à rompre sous ma poigne. En un instant, elle se tut tandis que sa carapce cédait complètement, et que sa tête explosait entre mes mains. Je fus couvert de jus de cervelle et de morceaux de carapace, tandis que je hurlais ma victoire.
Secouant mes mains remplies de bouillie, je sautais du dos de nérubien fraîchement broyé.
Mes six frères d'armes restants crièrent "Vive le Fracasse-crâne !! A mort le Fléau !!"

Pendant ce laps de temps, le général et les officiers restants s'étaient regroupés à côté du cadavre d'un énorme seigneur des cryptes que j'avais pulvérisé pendant la bataille. Les soldats convergèrent vers eux. Je repris rapidement mes haches, en arrachant eu passage le torse de ce qui restait du nérubien, pour rejoindre les officiers.

L'immense épuisement qui s'est emparée de moi à cet instant m'empêche de me souvenir de ce qui s'est passé... Enfin, dans les grandes lignes, il y a eu un joli discours, un bivouac de monté et l'attente des renforts. Maintenant que la plage était sûre, les autres bateaux pouvaient débarquer les hommes et le matériel afin de construire le premier avant-poste du Norfendre.

Encore une bataille. Encore une victoire. Et je suis encore en vie.
Quelle vie...